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samedi 12 juillet 2014

REFORME TERRITORIALE




Lettre ouverte au Président de la République sur la réduction du nombre de régions
ou
« le bazar anti-identitaire de la réforme territoriale »

      Monsieur le Président,

     Avant toute chose, il faudrait que je sache pourquoi vous vous êtes lancé dans cette réforme que personne ne vous demandait, à part les milieux d’affaires qui s’en sont emparés comme d’une marotte exigeante. En effet, il y a belle lurette que l’on n’entend plus guère les régionalistes dans ce pays – à part les Bonnets Rouges. Le grand souffle du Larzac s’est épuisé. Il y a aussi très longtemps que l’on sait que les institutions républicaines sont devenues coûteuse, pléthoriques, dépensières, concentrées sur leur promotion et la survie de leur personnel politique.

     Alors, Monsieur le Président, pourquoi vous risquez-vous sur un terrain que vous connaissez si mal ? Avez-vous tant besoin que cela d’ennemis et d’adversaires farouches, avez-vous la nostalgie des manifestations que vous vous appliquiez à réprimer l’année dernière avec une énergie féroce ?

     Aussi, permettez-moi de vous donner le conseil de vous appuyer sur ce qu’il y reste de vrais régionalistes en France qui, tous, souhaitent des régions plus grandes et la fin des départements... Souffrez alors que je vous aide et que je vous avertisse de certaines choses...

     L’insurrection de TOUS les élus locaux socialistes contre vous sera totale. Passé le premier moment de surprise et de désaccord rentré, celui-ci s’exprimera : il a d’ailleurs commencé dans mon Languedoc où André Vézinhet, le président du Conseil Général de l’Hérault – main dans la main avec Robert Ménard – a déjà convoqué des manifestations ouvertes « pour le département et le maintien de la région Languedoc-Roussillon ». Ces manifestations organisées avec l’argent public, les services de comm’ et le personnel des collectivités territoriales concernées ne fera guère illusion, mais quand même, cela fait du monde et du battage... et vous aurez à le payer un jour… un jour de primaire socialiste par exemple...

     Vous semblez avoir choisi votre formule. Ainsi que nous pouvions nous y attendre, elle est mal née et malade. C’est une sous-solution. Évidemment cette réforme ne s’attaque qu’aux petites régions actuelles en les obligeant à se coupler de façon obscène et parfaitement contre-nature. C’est la solution jacobine, anti-identitaire, sans imagination…

     Un peu d’histoire n’a jamais fait de mal à personne : en 1789 les révolutionnaires voulant éradiquer les coutumes, les langues vernaculaires et les patois, décident de supprimer toutes les références aux Provinces. Ils recouvrent la carte de France d’un papier calque et tracent un damier de 9 cases en « abscisse » et de 9 cases en « ordonnée », ce qui nous donne, en multipliant 9 par 9, les 81 départements d’origine mesurant chacun 18 lieues sur 18… 
     Astucieux n’est-ce-pas ? Puisqu’il fallait choisir une formule basique pour reformuler les régions, vous avez opté pour la règle 1+1 = 1. 
     Pas très fut-fut, mais vous vous êtes dit que ça ne fatiguerait pas les méninges de vos concitoyens… Voire ! Mais quant à choisir une règle, Monsieur le Président, il convient de s’y tenir… 
     La suite va monter que l’arithmétique, en Hollandie, ne fait pas bon ménage avec les menus arrangements entre amis : 3 régions (plus Île-de-France) doivent rester célibataires, une autre, devant faire ménage à trois.

     Dans ce découpage, le Plateau de Langres se découvre un accès à la mer à Berck-Plage par la grâce d’une fusion entre Champagne et Picardie à laquelle personne n’avait jamais pensé, la chaîne des Puy auvergnate fera sa jonction avec les Alpes et le Limousin occitan pourra désormais revendiquer les châteaux de la Loire… 

     Les Bretons ne récupèrent toujours pas la Loire-Atlantique... Quant aux Alsaciens ils sont désormais inféodés à la Lorraine plus peuplée, sous le prétexte que le mot « Alsace-Lorraine » fut utilisé par l’administration du Kaiser. 
     Votre réforme déstructure l’ensemble occitan qui, je vous le rappelle, dans son opposition langue d’Oc/langue d’Oïl structure la France depuis 1.000 ans. Ainsi, au lieu de rattacher à l’Aquitaine les deux Charentes, vous conservez bien au chaud pour Mme Royal (vous connaissez ?) le plus important « fief de France ». 
     Dans la même veine vous poussez l’Auvergne des bougnats vers Lyon qui n’en a rien à faire et vous ratez l’occasion de réaliser l’union des montagnols de Limoges à Mende en passant par Clermont-Ferrand. Vous aurez quand même réussi, Monsieur le Président à effacer, en ce jour du 2 juin, la limite entre pays de droit écrit et pays de droit oral
     Naturellement, Pays de Loire, la région déjà la plus improbable d’avant la réforme est conservée... Le Pays de Sens, à moins de cent kilomètres de Paris, désormais en région Champagne-Picardie, fera destin commun avec les stations de ski de fond du Jura, à la frontière suisse... 
     Dans cette affaire vous aurez au moins réussi à faire plaisir à vos amis Jean Yves le Drian (Bretagne), Alain Rousset (Aquitaine), Jacques Auxiette (Pays de Loire), ce qui est tout à votre honneur puisque l’amitié c’est sacré ! Vous n’aurez pas oublié en tous cas une « petite » manœuvre politicienne puisque vous éviterez peut être dans le nord grâce à vos rafistolages qu’une région ne puisse tomber prochainement entre des mains « Bleu-Marine ». 
     On aurait aimé, par contre et enfin que vous détachiez de Paris les départements de la Grande Couronne ce qui aurait permis de désengorger la capitale de la France et de rééquilibrer quelque peu le PIB de la région Île-de-France en faveur des régions mitoyennes. 
     Mais pour un bon jacobin, la France sera toujours Paris et encore avons-nous échappé au pire puisque des technocrates voulaient profiter de l’aubaine pour pousser le « ventre de Paris » jusqu’aux côtes de Normandie.

     Et que dire enfin de ce mépris des petites patries périphériques à forte connotation identitaire : Comté de Nice, Catalogne nord, Pays Basque, Vendée, Savoie…que le simple bon sens doterait de pouvoirs étendus en matière de culture, d’enseignement, de langue, de tourisme… et qui pourraient constituer des « pays » au sein de leurs régions administratives de rattachement.

     Mais, au fait, aviez-vous les connaissances géographiques nécessaires ? Savez-vous ce qu’est une poignée de militants arpitans ? Savez-vous que la Vendée s’appelait jadis Bas-Poitou ? Savez-vous que les Ardennes étaient appelées Basse Lorraine ? 

     Savez-vous ce qu’est le Croissant occitan ? En un mot avez-vous cette connaissance intime des atlas historiques que l’on n’acquiert que par la passion des territoires... Sans vous faire injure, j’en doute car il est normal que votre imaginaire républicain et votre passage à l’ENA ne vous aient jamais poussé sur ces pentes.

     Saviez-vous que réformer un régime au ventre épuisé n’est pas chose aisée... Voyez ce qu’il advint à Louis XVI qui convoqua les États Généraux dans l’intention de bien faire... Un pays à bout de souffle se caractérise, on le sait tous, par la très grande susceptibilité de sa population et une angoisse générale qui fait repousser jusqu’à la main du sauveteur. 

     Combien de noyés mordent au sang celui qui veut les arracher aux abîmes, combien lui lancent des coups de pied violents ? Presque tous... C’est ainsi ! Je sais bien que vos services vous disent aujourd’hui qu’il faut alors combiner la vitesse à une forte communication... mais justement, les peuples abusés n’aiment plus la vitesse, elle les terrorise et réveille chez eux une haine endormie par l’assommoir social.

     Comparé à un gouvernement d’une trentaine de personnes et à un Parti Socialiste compté, le 25 mai dernier, à 13,96% des voix (soit 5,5% des inscrits sur les listes électorales), le peuple français connaît désormais sa force. Celle-ci est immense. 

     Au moindre retroussement de babines, vous changerez de trottoir. C’est écrit. Et même il ne faudra plus beaucoup de temps pour que le poison suprême des gouvernements n’agisse contre vous quand les fonctionnaires, y compris les policiers, se mettront à ne plus vous obéir au prétexte de se ménager des assurances envers le gouvernement suivant… On y est presque.

     Au fond, toutes vos initiatives se transforment immédiatement en piège.  À peine énoncée, la moindre de vos tentatives de réforme fait se lever contre vous « chez les gens » des torrents de haine littéralement surprenants... 

     C’est le propre des situations pré-révolutionnaires. Pincez-vous très fort, Monsieur le Président car la révolution n’est plus de votre côté. 
     Les conservateurs affolés et les maîtres haïs, c’est dorénavant votre clan. On vous opposera d’abord que réduire le nombre de régions ne réduit en rien le mille-feuilles administratif... et puis qu’il est curieux de vouloir supprimer les départements alors que votre découpage en super-régions se fait exactement selon les limites de ces mêmes départements. 
     D’autres crieront évidemment au morcellement de bazar et au « massacre » en évoquant fatalement un découpage à la tronçonneuse ! Beaucoup de citoyens vous diront alors : « La France n'a pas de racines historiques, peut-être ? Mais, n'a-t-elle pas des Provinces, riches de leurs particularismes ? »

     Monsieur le Président, votre grand argument, si je vous entends bien, est de vouloir « faire des économies ». 
     Faudrait-il encore que les futures régions fonctionnent mieux, en particulier du point de vue administratif, que les actuelles. 
     Si j’osais la provocation à ce stade du raisonnement, je vous demanderais si vous êtes réellement sûr que ce n’est pas leur gestion socialiste et clanique qui les rend foncièrement incompétentes, mais ce serait là une griffure inutile car je suis d’accord avec vous : il faut de plus grandes régions et il faut en finir avec le doublon cancéreux des Conseils Généraux qui sont le siège du clientélisme et de la gabegie.

     Votre réforme concernerait, paraît-il, les quelque 13.500 syndicats intercommunaux qui gèrent les déchets ou l'approvisionnement en eau dont le gouvernement souhaite la concentration, la rationalisation, voire le transfert aux intercommunalités. 
     Mais c'est avec l’autre volet de la réforme territoriale, la suppression du département, que vous avez agréablement surpris. 
     Vous souhaitez apparemment « engager le débat sur l'avenir des conseils départementaux »... « Aussi, je vous propose leur suppression à l'horizon 2021 », avez-vous expliqué en guise de première contribution. 
     À l'horizon 2021, c'est-à-dire au terme des mandats des conseillers départementaux qui seront élus en 2015. Autrement dit, à la Saint Glin-Glin…

     Ambitieuse sur le papier, votre réforme globale sera d'autant plus compliquée à négocier que votre parti dirige près des deux tiers des 101 départements. 
     Le président de l'Assemblée des départements de France, le socialiste Claudy Lebreton, a immédiatement dénoncé « la brutalité de la méthode employée par le gouvernement » et vous a promis un débat « long et difficile »
     À l'inverse, le président de l'Association des Régions de France, Alain Rousset, a salué une « étape de décentralisation très ambitieuse »... « Réduire le nombre de régions pour plus d'efficacité, je dis chiche !» a expliqué le Président PS du Conseil Régional d'Aquitaine. 
     De son côté, Marylise Lebranchu se dit, à la façon des seconds couteaux serviables et empressés : « très déterminée à mettre en œuvre cette nouvelle organisation territoriale, ambitieuse, moderne et efficace »
     Ne vous laissez pas obscurcir par quelques empressements de gens d’écurie à vous flatter : votre tâche est pratiquement impossible à conduire.

     À la recherche d'au moins 50 milliards d'euros d'économies de 2015 à 2017, vous avez déclaré à la mi-janvier vouloir vous attaquer au mille-feuilles administratif français. 
     Voilà certes une réforme apparemment peu coûteuse et qui pourrait rapporter gros, mais quand ?                  Combien de temps pour percevoir les dividendes de cette économie d’échelle ? Dix ans ? Quinze ? Allons... 
     On a du mal à penser que l’économie soit le véritable mobile présidentiel. Ne s’agirait-il pas plutôt de s’acheter à pas cher une réputation de courageux dans la tempête ? Quoi qu’il en soit, vous multipliez les déclarations fracassantes, ayant décidé d’être en France à la manière de ce que vous êtes au Mali… 
     Sauf que les Africains sont gentils avec vous mais plus que ce que peuvent l’être aujourd’hui les Français.

     L'enjeu de votre réforme est loin d'être négligeable, puisque les collectivités locales représentent plus de 20% des dépenses publiques. 
     En 2012, elles ont progressé de 7,2 milliards (+3%). Cela s'explique principalement, selon la Cour des Comptes, par un accroissement spectaculaire des dépenses de personnel. 
     Dans les communes et leurs groupements, celles-ci ont augmenté de 3% en moyenne annuelle de 2009 à 2012. 
     Jusqu'à présent, le développement de l'intercommunalité « n'a pas été générateur d'économies, bien au contraire », insistent les Sages de la Rue Cambon. 
     En clair, le transfert de compétences au niveau intercommunal ne s'est pas traduit par une diminution de personnel dans les communes. La « constitution de services communs », amorcée par endroits, favoriserait la « maîtrise des effectifs ».

     Quoi qu’il en soit, vous savez très bien, Monsieur le Président, qu’il faudra au moins 10 ans pour mettre en place un autre découpage par « consentement mutuel » des collectivités existantes. 
     Vaincre les susceptibilités, négocier les partages de responsabilité, donc le pouvoir, refaire les plans d'aménagement du territoire. 
     Que de réunions, de discussions, de palabres en perspective. Pendant ce temps, toutes les administrations seront au ralenti, on retiendra les décisions, et il y aura, forcément un autre gouvernement qui viendra modifier les règles.

      Durant votre conférence de presse, en janvier 2014, vous aviez esquissé le contour de la réforme en annonçant la réduction du nombre de régions… sur la base du volontariat mais avec de « puissantes » incitations et modulation des dotations de l'État pour favoriser les collectivités qui suivraient cette voie. Vous, êtes allé plus loin en fixant pour objectif une « réduction de moitié du nombre de régions dans l'Hexagone » d'ici à 2017.

     Peut-être avez-vous claironné un peu maladroitement car en donnant le chiffre de onze régions (la moitié de 22 ça fait 11 même sous un gouvernement socialiste), vous semblez avoir pris le parti de la région fonctionnelle. 
      Or c’est ici votre erreur. Votre tentation révolutionnaire vous expose à de graves déconvenues. Plutôt que de parler de redécoupage, alors que la force politique vous manque pour l’imposer, vous auriez mieux fait de parler d’amélioration du découpage existant. D’autant que de 11, vous êtes passés à 12, puis à 14 et finalement à 15… Voire ! D’autant que les arbitrages et négociations de cabinet pourraient relever l’addition

     Je crains, Monsieur le Président que votre réforme ne fasse finalement courir un très grand risque à l’idée régionale qui ne vous avait pas attendu pour cheminer ! La thèse du géographe Jean-François Gravier « Paris et le désert français » (1947), est que le centralisme politique hérité de l'Ancien Régime a gagné, de proche en proche, les sphères économique, culturelle, éducative, jusqu'à faire de la centralisation parisienne la règle générale.

     Au fond, et à votre habitude, Monsieur le Président vous n’avez pas su choisir. Choisir le principe directeur de votre futur découpage. Sera-t-il « fonctionnel » ou « identitaire » ? S’appuiera-t-il sur la géographie contemporaine ou sur l’histoire et les bassins linguistiques anciens ? 
     C’est tout l’enjeu de votre réforme et c’est évidemment là que vous jouez votre avenir politique puisque les risques des jacqueries régionales (qui seront soutenues, n’en doutez pas, par les institutions socialistes en place) sont énormes et vous auriez tort de les sous-estimer.

     Pour de nombreuses questions d'économie régionale, il peut apparaître judicieux d'appliquer la notion de région économique fonctionnelle
     Elle concerne un espace géographique dans lequel les facteurs de production travail, capital, sol et savoir sont étroitement interdépendants. 
     Mais une fois que l’on a dit cela, on reste devant une question majeure : celle des communautés de destin acceptées par les populations dans le réel... 
     Cette position économiste anti-identitaire, c’est celle de Jacques Auxiette, votre ami, ci-devant Président de la région Pays de Loire.

     En effet, la région fonctionnelle n’est qu’un paramètre de décideurs, un concept de décideurs, une réalité de décideurs... Si la population ne l’adopte pas, si elle la récuse, on se trouve alors dans la situation intenable des actuelles communautés de communes françaises dont la population ignore généralement qui les dirige et même comment s’appellent ces usines à gaz... 
      Bref, le déficit de démocratie est alors à son comble et l’oligarchie ne peut plus se cacher derrière des apparences futiles. La domination conceptuelle devient si criante qu’elle froisse les oreilles...

     En France, la région fonctionnelle construite sur des bassins d’emploi, des nœuds routiers et ferroviaires et sur la zone d’attractivité d’une grande métropole fait que, normalement, un vendéen devrait se considérer depuis longtemps comme un habitant de la grande périphérie nantaise... 
     Or le Vendéen, même habitant au plus proche de Nantes, situé parfois à moins de trente kilomètres, se sent avant tout Vendéen… 
     Allez savoir pourquoi ! À ce niveau, c’est l’histoire et une fierté locale ancienne qui le retiennent, au grand dam de tous les apôtres de la région fonctionnelle pourtant si mirifique, si porteuse d’emplois et de potentialités futures. 
     Non, le Vendéen veut rester Vendéen. Ses anciens bocages l’habitent encore assez pour se sentir différent des urban warriors qui peuplent le centre-ville de Nantes. C’est ainsi. C’est irréfragable… Aucun rapport ne peut rien contre cela... Surtout que la Vendée, presque sans atouts majeurs, s’est attirée toute seule une prospérité surprenante qui ne fait évidemment que renforcer son identité.

     En regard de la région fonctionnelle, on voit la Région identitaire et c’est paradoxalement toujours celle-ci que l’on nous présente comme le modèle de réussite à l’étranger. La Bavière, la Catalogne, la Lombardie la Flandre, le Piémont et bien d’autres sont les régions les plus industrieuses d’Europe. 
     En matière de compétition internationale, ces régions jouent désormais un rôle de premier plan. L'activité innovante de leurs entreprises peut leur conférer beaucoup d'importance. 
     De nouvelles approches économiques partent, par exemple, du constat que c'est au niveau régional qu'apparaissent pour l'essentiel les connaissances nouvelles, ainsi que les produits et les procédés novateurs.

     Tout le monde oublie de signaler que c’est parce qu’elles sont probablement le contraire de la région fonctionnelle et qu’elles sont dotées d’un supplément d’âme peu mesurable en termes de statistiques, mais qui doit être bien réel puisque il est indéniable que les grandes régions d’Europe sont d’abord identitaires...        Car si le principe de fonctionnalité avait dû présider à leur délimitation, la Flandre (éloignée de son centre Bruxelles) ou la Bavière (située à cheval sur deux bassins fluviaux différents) n’existeraient pas plus que la Catalogne qui, si on devait lui appliquer les principes de découpage « fonctionnels » serait au moins lestée de l’Aragon et peut être de deux ou trois autres régions pauvres, lesquelles amoindrirait son excellence.

     Monsieur le Président, contrairement à ce que vous entendez partout dans les cabinets de la technostructure étatique, la région identitaire est de loin supérieure en efficacité économique à la région fonctionnelle. Et comme elle apporte bien d’autres avantages sur le plan de la cohésion sociale et culturelle, on se demande pourquoi vous la condamneriez au nom de la modernité...

     La République a toujours eu l’habitude de considérer que tout ce qui existait avant elle ne valait rien. La « table rase » fait partie de son ADN et c’est là le principal reproche que l’on peut lui faire, au-delà de la forme de gouvernement. 
     La régionalisation en France est un mouvement lent et tâtonnant. La république centralisa à fond à son origine et maintenant elle ne sait plus qu’en penser vraiment… Alors elle penche pour une conception brutale qui la libérerait enfin de la subtilité. 
     La République veut-elle dessiner uniquement des régions fonctionnelles et faire ainsi le lit de l’Europe oligarchique ? 
     Veut-elle redonner « aux gens » le plaisir et la force d’être « de quelque part » ? Veut-elle simplement réaliser des économies ? 
     Veut-elle en finir avec ce système désormais trop visible de la multiplication des lieux de pouvoirs augmentant scandaleusement le nombre des élus -entre 800.000 et 1.000.000 ? 
     Veut-elle imiter seulement l’Allemagne et obéir ainsi aux agences de notation ? Personne ne le sait vraiment. Il faut dire qu’au fond des incantations républicaines, il n’y a jamais d’explications audibles. Reconnaissez, Monsieur le Président, que vos mobiles sont en suspension dans l’air... 
     On dirait que vous ne prenez de décisions que lorsque vos deux pieds se sont détachés du sol... Vos raisons sont alors devenues notoirement aériennes... Ce qui me conduit, à vous poser la question essentielle: quelle région voulez-vous ? 
     Est-ce la même que la mienne ? Ou bien plutôt êtes-vous convaincu par la région fonctionnelle telle que la définissait Jean-Louis Quermonne, membre fondateur, avec Jacques Delors en 1996, du think tank oligarchique Notre Europe ?

     On oublie parfois que la région fonctionnelle idéale a été déjà découverte en France et appliquée avec un franc succès. Ce fut lors du passage aux dix chiffres téléphoniques. Cinq zones d’égale importance furent créées. 
     Depuis, elles se sont faites admettre et sont entrées dans les habitudes des gens, au point que pratiquement tous les français savent à quoi elles correspondent : le Un est à Paris, le Deux est à l’Ouest, etc. 
     C’est la réforme orwellienne parfaite, il ne lui manque que « Numéro Six » pour la combattre... 
     Cette réforme est naturellement le rêve inavoué des fonctionnalistes qui, ne pouvant cependant appliquer sa brutalité idéale, passent alors leur temps à tenter de donner un nom et de la chair artificielle à des montages hasardeux aussi variés que fantaisistes.

     Monsieur le Président, c’est en poussant une méthode à son extrémité et, surtout, à sa perfection, que l’on voit apparaître ses limites. La région fonctionnelle est froide et totalitaire. Elle semble pratique, on la pense d’abord née d’un cerveau simplificateur et pragmatique : elle est en fait un avant-goût de l’enfer.

     La Région, en tant qu’entité sociopolitique, vient au second rang après l'État (région, province italienne, land allemand, supersovnarkhoze dans l'ex-URSS...). La dimension varie d'un pays à un autre et il n'y a pas de critère fixe de taille. 
     La région est dotée d'une certaine autosuffisance relative. Les principaux services et fonctions y sont présents, assurant la satisfaction des besoins des habitants, autour d'une métropole qui en assure la coordination, le rôle moteur et la redistribution et la régulation. Le recours à l'échelon supérieur est spécialisé et exceptionnel. 
     La métropole est relayée par des centres. La région est donc un espace organisé par une métropole et ses relais. « C'est le dernier niveau autour duquel se structurent et se coordonnent les différentes forces intervenant dans la vie économique et sociale, avant le niveau national » énonce intelligemment le géographe Étienne Juillard. La notion de région est liée à celle d'armature urbaine, ou plutôt de réseau urbain. Son contenu varie avec le niveau de développement économique et les techniques. Sa dimension est variable dans le temps et dans l'espace.

     Voici Monsieur le Président la position identitaire que je voulais vous communiquer, à chaud, dans un survol rapide. Évidemment, puisque ceci est une lettre ouverte, je n’ai pas pu aborder faute de place, la suppression des départements et le réemploi de leurs salariés, l’impérative question des communes pour lesquelles il faut fixer un seuil entre 1.000 et 2.000 habitants, la suppression des communautés de commune, dispendieuses et anti-démocratiques, les regroupements urbains et ruraux au sein de « Pays » simples établissements publics qui permettraient la mise en commun des compétences, des projets communs et des moyens…

     Je vous laisserai dans les prochains jours, au Palais de l’Élysée, un rapport complet sur les propositions identitaires en vue de réformer ce mille-feuilles administratif que le monde entier ne nous envie pas…

     Je vous prie d’agréer Monsieur le Président l’assurance de mes salutations distinguées.

(L’auteur a mis son nom, et a signé)     "mais  je ne le vois pas"

7 commentaires:

  1. Un texte intéressant mais tout en longueur, tout en complication pour moi et avec trop de Monsieur le président. Cette réforme territoriale nous en parlons depuis des années, car elle nous bouffe de l argent, fait des doubles emplois pour souvent pas grand chose.
    Elle a toujours été retardée parce que chacun veut tirer la couverture à soit, chacun défendant et voulant protéger la sienne, et elle le sera encore compte tenue des divergences d opinion - Pendant qu on "blablatise" sur ce sujet, on oublie les importants du moment, et dieu sait qu il y en a.
    La réforme territoriale, si elle doit se faire un jour, se fera avec de nombreuses magouilles comme toujours, avec des arrangements entre amis, avec quelques mécontents. Et on fera passer la couleuvre au Français en expliquant que le socialisme procède à des reformes nécessaire et indispensable.
    Personnellement j attends de voir ce qui va se passer.


    La Normande

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    1. Comme vous La Normande, j attends de voir où cela va nous mener, il est vrai que l on nous parle des ces reformes depuis très longtemps, et que toutes les discussions n aboutissent à rien mais cela semble tellement évident de part les intérêts qui sont en jeu. Personne ne veut perdre sa poule aux œufs d or.
      De nombreux arrangements devront se faire, et comme vous j emploierais plutôt le mot magouille qui sans elle la politique n existerait pas.
      Nous avons déjà évoqué et BBR a déjà mis nombreux articles sur LE FRIC qui mène le monde, il mène donc aussi la France, ses régions, ses départements il n y a que le pauvre contribuable qui paye tout, il est donc aussi une poule aux œufs d or pour le politique mais en réalité il est le dindon de la farce dans toutes les sauces.
      Certaines régions trouvent "un intérêt" à fusionner d autres aucun, certains président acceptant la fusion veulent le titre de chef suprême.
      Nous sommes très loin de comprendre toutes leurs salades et on ne nous expliquera surement pas tout, et juste ce qu on voudra bien laisser filtrer en tenant compte qu il faut que le Français se sente rassurer même si ce n est pas le cas.
      On prend souvent les français pour des "gobeurs", ils gobent tout, on leur fait même manger des couleuvres et l histoire se renouvelle à chaque pouvoir en place,nous faisant- subir des septennats, des quinquennats. Pauvre France


      André BERGERAC

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  2. Dans cette réforme nous ne tenons pas tous les tenants et les aboutissants,il s agit encore de salade politicienne où traîne encore le mot fric.
    Pourquoi ne s est t on pas rendu compte avant que tout cela allait faire double emploi ? Bien sur que les politiques le savaient, mais cela les arrangeait bien, pouvoir, magouille, argent seraient au rendez vous.
    Et d un seul coup, "cerveau cacarinette" a décidé que ça devait être maintenant. Il ne se doutait pas qu une tell réforme allait être très compliquée et que ceux qui sont à la tête des régions n allaient pas se laisser manipuler aussi facilement.
    Il s est dit tiens " Une réforme" ça va faire plaisir au Français. Peut être que ma côte de popularité va remonter, je suis vraiment trop bas en ce moment.
    Je ne pense pas que cette réforme va se faire dans l immédiat, et peut être qu une fois encore si l intérêt est ROI elle ne se fera peut être jamais.
    On prend notre argent, et on ne nous demande jamais notre avis pour le dépenser.
    Tout ce que l on constate c est qu il part en fumée au profit de toujours les mêmes dont nous ne faisons pas parti. Alors avec leur réforme il me gonfle.


    Nicole PLEY

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  3. Le traine couilles de l’Elysée est désespérant. Avant même d’avoir lancé la nécessaire réforme territoriale, il l’a déjà rendue impossible. Il risque même d’enflammer à nouveau les esprits, un an après le mariage homosexuel, en persistant dans son indifférenciation non plus des sexes mais des identités. Alors que, sur cette question passionnelle, tous les signaux sont au rouge, il est sidérant de voir le chef de l’Etat trancher à la hussarde dans 1500 ans d’histoires de France, pour tenter de feindre la détermination. Le président en perdition est devenu un danger public pour la société qu’il ne cesse de brutaliser dans ses convictions, ses ancrages, ses modes de vie. Seul le mépris de l’énarchie pour la société civile et ses attachements intimes aux frontières, aux délimitations et aux coutumes peut expliquer ces mariages forcés. Ils uniront, par exemple, Picardie et Champagne-Ardenne, Auvergne et Rhône-Alpes, Poitou-Charentes-Limousin et Centre, etc. dans des liaisons fictives. A contrario, la même indifférence pour la cohérence culturelle a fait renoncer à joindre la Loire-Atlantique à la Bretagne. Comme l’écrit Jean-Robert Pitte, (Les) Franc-Comtois voient-ils d’un si bon œil leur rattachement à Dijon, alors qu’ils sont indépendants de la Bourgogne depuis 1477". Les Bonnets Rouges ont montré, dans leur filiation revendiquée avec la grande révolte bretonne de 1675 contre le pouvoir royal, que les peuples des provinces avaient de la mémoire.

    Hollande et son camp ne veulent visiblement pas comprendre que l’idéologie dont ils se réclament, celle de la table rase et de la globalisation, se heurte à la résistance des gens légitiment attachés à leur passé. Pour ces derniers, la France n’est pas davantage amnésique que ses régions ou ses départements. Or le pouvoir persiste à vouloir développer une vision utilitaire, uniforme et interchangeable, où le "Français de souche" n’a plus sa place. Des jihadistes se retrouvent "Français" aussi naturellement que des orléanais se retrouvent charentais. Cette vision d’inspiration totalitaire est celle d'un pouvoir devenu fou. C’est sans aucune concertation, sur un coin de table, que cette réforme territoriale bâclée a été imposée. Lundi soir à 20 heures, Hollande n’avait toujours pas tranché sur le nombre des régions (14) qui ne sera annoncé qu’à 21h15, après tractations avec les barons socialistes. Il est bien sûr difficile de conduire de telles réformes d’envergure. Mais il faut au moins arrêter un objectif et écouter les citoyens. Hollande, lui, instrumentalise la régionalisation pour détourner les regards de ses incapacités à désendetter l’Etat. Il a pris le risque, en exposant tant d’inutiles maladresses et en jouant avec le feu des identités, de faire à nouveau descendre les Français dans les rues.
    @

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  4. hollande ne sait plus où donner de la tête, il est mauvais partout, son pouvoir de décision montre à quelque point il est nuisible et même très dangereux pour notre pays.

    Son incapacité à diriger la France est de plus en plus inquiétante, son programme était déjà incompris, même celle du mariage pour tous qui a fait couler beaucoup d encre en étant réussie grâce à une tricherie à l Assemblée Nationale laisse perplexe le peuple Français.

    Son pacte de solidarité est une vaste fumisterie afin de faire patienter le peuple par rapport à sa flambée du chômage dont son inversion doit se trouver dans ses fesses.

    Aujourd hui il n a pas trouvé mieux que de vouloir faire cette réforme qui en l état actuel des choses n a ni queue ni tête. Il y a plus urgent.

    La plus grande URGENCE serait son DÉPART. Sa CAPITULATION face à son INCOMPÉTENCE.

    Comme à son habitude (tels son cap, sa valise à outils et ses pactes) il voudra décider seul de ce qui est bon ou pas pour nos régions, comme à son habitude il se foutra de l avis des autres y compris des partenaires sociaux , n ayant besoin d eux que pour se faire élire.

    IL MET LE FEU AU POUDRE - L ÉTINCELLE EST PROCHE. Il est loin d évaluer sa distance et ne s en rendra compte que lorsque ça va lui péter dans la gueule, même avec son nouveau look.

    Nombreux sont ceux qui espère que ça va péter, moi en tête.


    Nathalie

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    1. Bien parlé Nathalie - Nous sommes sur la même longueur d ondes, on pourra toujours se poser la question de savoir comment cet extra terrestre a t il pu être élu président de la République. L anti sarko n est pas la seule raison en cause.

      Vouloir du changement c est bien, mais encore faut il en connaitre LE PRIX à PAYER.

      Je reconnais que nous n avons en France aucun Politicien capable, ils sont tous submergés par les affaires en cours et celles qui les rattrapent.

      C est bien pour cela que le PUTSCH va être indispensable pour notre sécurité à tous.

      Toutes les réformes qui sont entreprises vont à l encontre du désir des Français

      Il n y a pas que Claude François le Mal Aimé qui était incompris, le peuple Français n est pas compris et pourtant c est lui qui vote, qui choisit les élus qui vont nous représenter.

      On désespère d attendre le jour où tout ira mieux - Moins de chômeurs, la relance économique, un bon pouvoir d achat, davantage de sécurité avec une justice adaptée, des salaires et des retraites qui remontent, des impôts qui diminuent. Mais tout cela n est qu un rêve bien sur.

      Combien de temps encore devons nous être patient ? Allons nous réellement attendre la fin de son quinquennat ? Je prie pour que le PUTSCH ait lieu.

      Olivier TREQUEL

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  5. Avez vous déjà entendu parler de réformes qui fassent plaisir au Français que nous sommes ? Quoi donc ?
    Réforme de la sécu - des retraites - de la justice ou son code pénal ..... de la fiscalité, .....et la liste est longue .......très longue.
    Les réformes sont souvent faites pour avantager certains au détriment des autres comme tant de choses.
    Celle concernant la réforme territoriale sera aussi faite dans ce même sens que l on ne s y trompe pas, et aucun doute que hollande doit y voir un intérêt, et son valls aussi sinon ils n essayeraient pas de précipiter les choses malgré tous les désaccords - Région - Département - cumul sont évidement des gouffres mais est ce bien le bon moment choisi alors que tout va mal en France pour évoquer un tel sujet.
    Le peuple grogne, gronde, pour des tas de raisons justifiées, une révolution est proche et hollande veut attiser la flamme. Il ne m étonne pas que son cerveau marche au ralenti compte tenu de toutes ses décisions.
    Les Français en ont marre de cet homme ridicule à petit pourcentage dans les sondages. Mais qui nommer à la tête de notre pays ? Là est la question ?

    Jean BOUVARD

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